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Salle
de réception (intérieur soir)
Firefly attend, placé dans la haie d'honneur, alors que
l’hymne est entonné par tous les invités.
Madame Teasdale, installée de l'autre côté,
une grande plume à la main, l'aperçoit soudain.
— Oh ! Votre Excellence ! s’exclame
Mme Teasdale qui le rejoint aussitôt pendant que les gardes
et les danseuses dirigent leurs regards vers Firefly. Nous vous
attendions. En s’approchant, Mme Teasdale tend la main
à Firefly qui fait un pas en avant pour la lui prendre.
En tant que présidente du
Comité de Réception, je voudrais vous faire part
des bons vœux de chaque homme, femme et enfant de Freedonie
déclare-t-elle d'un ton solennel avant de lâcher
la main de Firefly.
— Laissez tomber. Prenez une carte répond
Firefly en sortant un paquet de cartes à jouer.
— Une carte ? Que ferais-je d'une carte ?
Firefly lui présente les cartes disposées en éventail
et, après que Madame Teasdale en a choisi une, remet
les cartes restantes en paquet. —
Vous pouvez la garder. Il m'en reste cinquante et une. Alors
que disiez-vous ?
— En tant que présidente du comité de réception,
je vous accueille les bras ouverts reprend-elle d'un ton officiel.
— C'est bien cela ! Jusqu'à quelle heure restez-vous
ouverte ?
— J'ai parrainé votre nomination parce que je pense
que vous tenez une grande place en Freedonie dit-elle après
avoir été un peu décontenancée par
la question de Firefly.
— Eh bien cela couvre une grande surface ! dit Firefly
et, l'observant des pieds à la tête, il enchaîne.
Dites-moi, vous couvrez une grande surface vous-même !
Faut le dire ! J'ai entendu dire qu'ils allaient vous abattre
pour construire des bureaux à la place. Vous pouvez partir
en taxi poursuit-il sans reprendre son souffle. Si vous ne prenez
pas de taxi, vous pouvez partir en hâte. Si c'est trop
tôt, vous pouvez filer dans une heure et demie. Vous savez
que vous n'avez pas cessé de parler depuis que je suis
arrivé ? Vous avez dû être vaccinée
avec l'aiguille d'un phonographe.
— L'avenir de la Freedonie dépend de vous. Promettez-moi
de suivre la voie tracée par mon mari reprend, sans se
laisser démonter et d'un ton emphatique, Mme Teasdale.
— Qu'est-ce que vous en dites ? se demande en aparté
Firefly. Cela ne fait pas cinq minutes que j'ai ce travail et
déjà elle me fait des avances… Ce n'est
pas que cela m'intéresse, mais où est votre mari
? demande-t-il en se tournant vers Mme Teasdale.
— Eh bien, il est mort.
— Je parie qu'il s'en sert comme excuse.
— Je suis restée avec lui jusqu'à la dernière
minute.
— Pas possible ! Cela ne m'étonne pas qu'il ait
trépassé.
— Je l'ai pris dans mes bras et je l'ai embrassé
réplique d’un ton langoureux Mme Teasdale.
— Alors c'était un meurtre ! Voulez-vous m'épouser
? Vous a-t-il laissé de l'argent ? Répondez d'abord
à la deuxième question.
— Il m'a laissé toute sa fortune.
— C'est bien cela ! Ne voyez-vous pas ce que j'essaye
de vous dire ? Il prend Mme Teasdale par les mains et tourne
autour d’elle. Je vous aime poursuit-il d'une voix mielleuse.
— Oh, Votre Excellence s'écrie Mme Teasdale aux
anges.
— Vous n'êtes pas si mal vous-même surenchérit
Firefly en roulant des yeux et soulevant ses sourcils. |
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Salon
de madame Teasdale (intérieur jour)
Madame Teasdale est en train de faire les cent pas, dans un
état de grande fébrilité. Elle tourne autour
d'un fauteuil disposé au centre de la pièce. À
son insu, Firefly entre dans la pièce et se met à
la suivre pour s'arrêter à la hauteur du fauteuil
et s'y asseoir. Madame Teasdale revenant sur ses pas, remarque
enfin Firefly. — Oh ! s’exclame
surprise Mme Teasdale.
— Comment êtes-vous entrée ? demande Firefly.
— Oh, Votre Excellence, je suis tellement désolée
de devoir vous déranger dit Mme Teasdale en se penchant
vers Firefly confortablement installé dans le fauteuil.
Me le pardonnerez-vous jamais ?
— Et quand je partirai d'ici ce soir, me le pardonnerez-vous
jamais ? Il se lève et tend à Madame Teasdale
une enveloppe. Voici les plans de bataille. Ils sont aussi précieux
que votre vie, ce qui les rend assez bon marché. Surveillez-les
comme une chatte surveille ses petits. Avez-vous déjà
eu des petits ? Non, bien sûr. Vous êtes trop occupée
à courir un peu partout pour jouer au bridge. Madame
Teasdale serrant nerveusement les plans dans sa main, prend
un air étonné. Ne voyez-vous pas ce que j'essaye
de vous dire ? poursuit Firefly en la prenant dans ses
bras. Je vous aime. Pourquoi ne m'épouseriez-vous pas
? lui demande-t-il en lui prenant les mains.
— Pourquoi vous épouserais-je ?
— Prenez-moi avec vous, et moi je prendrai des vacances.
Je vais avoir besoin de vacances si on se marie. Main dans la
main, ils prennent une pose romantique, leurs têtes se
touchant, l’une contre l’autre. Mariés !
Je vous vois dans la cuisine dès maintenant, penchée
au-dessus d'un fourneau dit-il d’un ton doucereux. Mais
du coup, je n'arrive plus à voir le fourneau ! Allons,
allons… Dites « oui » et vous ne me reverrez
plus jamais… se récrie-t-il soudainement en élevant
la voix.
Ils se dirigent tous les deux vers le canapé placé
derrière le fauteuil et s’assoient. —
Gloria !… dit Firefly d’un ton de nouveau doucereux
en enlaçant Mme Teasdale.
Il croise les jambes et attire Madame Teasdale vers lui en adoptant
un visage béat.
— Rufus, à quoi songez-vous ? demande Mme Teasdale
ravie.
— Oh, je pensais seulement à toutes ces années
gâchées à collectionner les timbres répond
Firefly en haussant les épaules plusieurs fois.
— Oooooh !… éclate en riant Mme Teasdale.
Firefly s'écarte alors de Madame Teasdale et se penche
en avant. — Oh… euh…
Je suppose que vous allez me prendre pour un vieux benêt
sentimental enchaîne-t-il avec timidité. Mais…
euh… accepteriez-vous de me donner une mèche de
vos cheveux ?
— Pourquoi ? Je ne m'attendais pas… se demande Mme
Teasdale, surprise et un peu gênée.
— Vous vous en tirez bien. J'allais vous demander toute
la perruque lui rétorque-t-il d’un ton ferme. |
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